GeorgeS Préveraud de Sonneville
1889 - 1978
Naissance et formation
Georges, Elzéar, Jean, Daniel Préveraud de Sonneville est né à la Villa du Banian, le 1er mars 1889, à Nouméa en Nouvelle Calédonie. Il décède à l’âge de 89 ans, le 22 mars 1978, à Talence en Gironde.
Il est issu d’une longue lignée de noblesse de robe, les Préveraud, installés depuis le XIVème siècle dans le Berry, puis en Charente. Ils accèdent à la noblesse d'épée au XVIIème siècle au titre de comte de Sonneville, après l’acquisition en 1688 du domaine du même nom aux abords de Villefagnan. Le peintre est le descendant direct de cette branche aînée, et portait donc le titre de comte. Son grand-père François Elzéar (1816-1893) s’établit à Bordeaux en 1836 pour y faire commerce d'armement et de vin vers les régions australes. Après une carrière militaire, son père Marcel (1847-1927) émigre en Nouvelle Calédonie pour y fonder un des premiers comptoirs écoulant les produits français que transportent les navires de son père Elzéar. Il épouse en 1877 Anne-Marie Taragnat (1859-1944), la fille aînée de Jean Taragnat, fameux propriétaire dans la Vallée des Colons. De cette union naissent quatre filles et le peintre Georges.
Son oncle et homonyme, Georges de Sonneville (1860-1907), était un amateur et critique d'art du Bordelais, maire de Sainte-Eulalie et négociant en vins.
Après une enfance heureuse passée dans les îles et un début d’études secondaires au collège de Riverview à Sydney, Australie, où il reçoit ses premières leçons de dessin et d’aquarelle sous la tutelle de Miss Spark, il arrive à Bordeaux à bord du paquebot L’Australien, le 23 août 1903, à l’âge de 14 ans, après un long voyage par Ceylan, l’Égypte, l’Italie... A son grand regret il ne reviendra jamais sur le sol de son île natale mais gardera toujours le souvenir du grand banian, la nostalgie de ses paysages, ses couleurs, sa lumière et son ciel sous La Croix de Sud. Il entreprend des études secondaires au lycée Michel de Montaigne, puis complète une licence en droit en 1909. Il entretient son goût de la caricature et du dessin en croquant sur le vif ses camarades et professeurs !
Il commence à fréquenter dès 1905 l’atelier de Paul Antin (peintre symboliste et portraitiste), dont il est le premier élève. C’est dans cet atelier et dans les soirées mondaines bordelaises qu’il rencontre Marguerite Latapie-Tronquet, dite Yvonne en famille, et qui suit elle aussi les cours du maître Antin. En 1907, il vend son premier tableau, publie chez Mollat un livre de caricatures, réalise des affiches publicitaires… bref, commence sa carrière d’artiste.
Son service militaire de trois ans, entamé en 1910, n’interrompt pas ses activités d’artiste, et pendant les permissions, à partir de 1911, Georges et plusieurs de ses amis artistes se réunissent au 58 rue Rosa Bonheur pour y dessiner d’après modèle. De retour du service militaire, Georges monte à Paris où il partage avec son ami Edouard Goerg un studio au 9 rue Campagne Première, à Montparnasse. Il étudie à l’Académie Ranson où enseignent Maurice Denis et Paul Sérusier, fondateurs du mouvement des « nabis ».
Entre Bordeaux et Paris
En avril 1914, de retour à Bordeaux, il épouse la peintre Yvonne Latapie-Tronquet (1888-1982) qu’il avait rencontrée chez Antin. Ils repartent tous deux à Paris, mais la déclaration de guerre en août les obligent à revenir à Bordeaux car Georges est mobilisé. Ils s’installent dans la maison familiale du 23 rue du Couvent, où ils auront un atelier. De 1914 à 1916, Georges servira à la Préfecture de la Gironde, où il rencontre André Lhote, peintre bordelais comme lui, puis à Chalon-sur-Marne de 1916 à 1919.
C’est entre 1914 et 1919 que le peintre revenu de Paris avec des idées nouvelles connaîtra sa période dite « fauve », et même, sous l’influence momentanée d’André Lhote, une expérience cubiste… avant de retourner à un style plus personnel, attentif aux émotions et à la poésie de l'art. Il commence en 1920 un journal de peintre où il couche ses pensées et observations d’artiste, qu’il continuera à rédiger jusqu’en 1958. Ce journal - « Les cahiers noirs » - sera publié en 1994 par ses héritiers. Robert Coustet, spécialiste de l’art et de l’architecture de Bordeaux, saluera à cette occasion un « document exceptionnel qui éclaire sa personnalité et constitue un témoignage rare pour l’histoire de la culture des élites et des artistes français de sa génération ».
Dans cette période bordelaise de la rue du Couvent, l’atelier des « Sonnos », comme on les surnomme, reçoit bon nombre d’artistes et d’intellectuels. Georges s’adonne alors à peindre le port, les bals et les cirques, la vie quotidienne de la ville, l’intimité de ses proches… Il expose dans les salons de Bordeaux et de Paris, son style se libère et devient propre à sa personnalité et à ses idées.
Entre 1925 et 1930, le peintre et sa femme avec leurs quatre enfants s’installent à la campagne, dans le petit village de Martillac, non loin de Bordeaux. C’est une époque heureuse, prolifique, où le peintre s’épanouit pleinement et immortalise les vignobles des Graves alentour. Georges et Yvonne y connaissent une vie paisible et créative, mais ne s’isolent nullement de la vie artistique et intellectuelle bordelaise et même parisienne. En 1928, il fonde avec son ami le journaliste Jean-Loup Simian le « Salon des Indépendants Bordelais », avec pour ligne de conduite : « ni jury ni récompenses ».
En 1930, la santé défaillante de leur aînée, Colette, les incite à déménager au Parc Saint Maure, en bord de Marne, afin de se rapprocher des médecins spécialistes de la capitale. La maladie de Colette et la grande dépression économique des années trente contraignent l’artiste à entamer une carrière administrative, qu’il termine comme Directeur de la Caisse Nationale des Allocations Familiales des Professions Intellectuelles, tout en continuant de peindre et d’exposer à Paris et à Bordeaux. Colette décède en 1933, bouleversant sans mesure la vie du couple… Rien ne sera comme avant, et la tristesse de Georges se fait sentir jusque dans son style.
Après le décès de Colette, la famille s'établit à Courbevoie, rue de l’ Alma, en face de la caserne des « Suisses ». Cette période est riche de nombreux tableaux : paysages de la Seine, Paris, l’Ile-de-France, le Périgord… Portraits de famille, bouquets et natures mortes… Le style du peintre évolue lentement, teinté de moins de fougue et de plus de tristesse, mais avec une maîtrise toujours omniprésente de la lumière et des formes. Il publie de nombreuses illustrations et caricatures dans les journaux, sous le pseudonyme de « Sono ».
Retraite champêtre
Les dernières années de sa vie s’écoulent tranquilles aux côtés d’Yvonne, dans la banlieue bordelaise où ils déménagent en 1964 pour se rapprocher de leur fille Denise, à Talence, rue Jouis. Il cultive son jardin en compagnie de son chien Uri, et lit entre autres les œuvres de l’humoriste anglais P-J Woodhouse. Il écoute les nouvelles sur « Radio Australia » avec la radio à ondes courtes qu’il avait construite lui-même, dans une boite de biscuits en fer avec des bobines en bois de fil à coudre ! Par amour conjugal, il renonce définitivement à peindre et même à « croquer » en 1965, Yvonne ne pouvant elle-même plus s’y adonner pour cause de maladie.
Décédé le 22 mars 1978, Georges Préveraud de Sonneville rejoint le caveau de famille à la Grande Chartreuse de Bordeaux. La ville de Gradignan lui a consacré un musée, ouvert en 2004 dans l'ancien Prieuré de Cayac, qui regroupe environ 80 œuvres majeures et de nombreux dessins, affiches et croquis.